Reprises du réel

présidence de séance: 
Ollivier Dyens
samedi 2 mai
communications: 

Vraies archives et faux documents : notes éparses sur l’assassinat de Bill Gates

Dix ans nous sépareront bientôt de l’assassinat de Bill Gates, l’illustre fondateur et président de Microsoft, au cours d’un rassemblement de l’association philanthropique « Literacy for Life » organisé au tristement célèbre MacArthur Park de Los Angeles. Si le souvenir de cette journée reste gravé dans la mémoire collective, l’impact traumatique de l’événement, lui, s’estompe et nous autorise aujourd’hui un commentaire distancé sur la tragédie du jeudi, 2 décembre 1999. On sait bien sûr que des individus de bonne foi contestent la version officielle de l’attentat, parmi lesquels les membres du groupe de pression Citizens for Truth (citizensfortruth.org) et l’enquêteur indépendant Jack Perdue (billgatesisdead.com). Le metteur en scène, cinéaste et militant du copyleft Brian Flemming leur a consacré, en 2002, le documentaire Nothing So Strange (Unsharp Mask/GMD Studio, 2002).
Tout en nous défiant par principe de toute rhétorique conspirationniste, nous tenterons de revisiter froidement certaines assertions formulées et répétés dans la foulée de l’événement. Est-il possible qu’Alek J. Hidell n’ait pas été le seul tireur embusqué ce jour-là et que d’autres assassins soient toujours en liberté ? Est-il possible que le Département de police de Los Angeles (LAPD) ait voulu cacher plus que l’incompétence inadmissible de quelques-uns de ses subordonnés ? Est-il possible que les conclusions de l’imposant rapport Garcetti (garcettireport.org) n’aient servi au final qu’à tisser un grossier simulacre de vérité ?
Que Bill Gates soit aujourd’hui vivant et en parfaite santé, que toute personne saine de corps et d’esprit soit à même de s’en rendre compte et que le film de Brian Flemming, les documents d’archive et les artéfacts web produits en son sillage constituent autant de traces d’une fiction, voilà bien des considérations ennuyeuses et superfétatoires, auxquelles nous consacrerons cependant, par souci d’objectivité, une part importante de notre réflexion. Nous tenterons de voir comment une grande œuvre participative (au sens de Jenkins, 1992 et 2006) s’est développée à partir du film de Flemming, témoignage hyperréaliste issu d’un univers parallèle ; comment cinéastes, spectateurs et internautes ont détourné la capacité documentaire de l’archive filmique et numérique, afin de se réapproprier la figure historique du complot meurtrier et fournir à la fiction un grand déploiement tentaculaire. Nous interrogerons finalement les enjeux éthiques et esthétiques de cette stratégie, que Flemming lui-même qualifie de piratage de la réalité (« reality-hacking »)

Présentateur: 
heure: 
11h45